jeudi, octobre 26, 2006

L'architecture et l'éducation 2

PAR MARIO ROSALDO


Le siècle XIXe est une sorte de creuset dans lequel vont se rencontrer les divers tendances empiristes, rationalistes et métaphysiques: l’idéalisme de Fichte, Schleiermacher, Schelling et Hegel ; le matérialisme de Marx et Engels ; et le nihilisme de Nietzsche. C’est le siècle du romantisme et du positivisme, un siècle de luttes entre la tradition et le progrès. Dans la première partie du siècle l’utopisme romantique et socialiste se présente dans une variété de points de vue. Goethe évoque une harmonie et un progrès naturel auquel tout homme doit tendre. Schiller formule l’idée d’un équilibre entre la science et la philosophie modéré par l’éducation esthétique de l’homme. Coleridge reprend cette vision et insiste sur la participation nécessaire de l’artiste dans la rénovation morale de la société. Les socialistes comme Fourier et Saint-Simon ouvrent les portes à la possibilité de reformer la société.

Dans la seconde partie du siècle XIXe la relative amélioration des nivaux de vie de l’ouvrier comme les conquêtes politiques de ses partis divisent la lutte en communistes et socialistes, en Marx et Proudhon. Après les révolutions de 1848 le mutualisme et l’autogestion se renforcent au détriment de l’action révolutionnaire : la social-démocratie apprend à cohabiter avec l’État. Libérés du spectre de la révolution, État et Capital favorisent conjointement la continuation du modèle industriel, la nécessité d’incrémenter la production et d’assurer le marché même en colonisant ou en faisant des inversions à l’étranger.

En Angleterre, Arnold et Ruskin continuent les idées de Coleridge et Carlyle : la culture et le perfectionnement spirituel deviennent le moyen pour rénover le moral de la société : c’est l’artiste seul qui peut aider la religion et la politique à rétablir l’équilibre entre la vie spirituelle et la vie matérielle. Malgré quelques coïncidences, surtout l’idée du rôle actif de l’artiste, Morris repousse la simple rénovation sociale ; pour lui, il faut créer les conditions de cette rénovation, il faut faire une révolution socialiste qui libère l’homme de l’exploitation industrielle et lui restitue l’équilibre perdu. La tradition littéraire anglaise en même temps inclut une posture plus esthéticienne que morale : la doctrine de « l’art pour l’art » dont l’exemple extrême est Whistler.

Pendant tout le siècle, la politique éducative en France, Angleterre et Allemagne s’oriente à la formation de fonctionnaires pour l’administration de l’État comme de cadres pour la base commerciale et industrielle. En France, l’Académie Royale d’Architecture, supprimée en 1793, est remplacée en 1816 par l’École des Beaux-Arts. L’École Polytechnique, réorganisée en 1817, est dénommée École Royale Polytechnique. Les pédagogues français et allemands mettent l’accent sur l’éducation des enfants : Oberlin, Pestalozzi, Herbart, Itard, Fröbel, et Seguin, dans un esprit romantique et surtout positiviste, développent divers méthodes d’apprentissage. Après l’école d’arts et métiers apparaît l’école mutuelle. L’organisation juridique et politique crée des normes et promulgue de lois favorables à l’émergence d’un système scolaire.